ESAT HORS LES MURS

09 juin, 2021


ESAT HORS LES MURS


Un dispositif innovant pour l’emploi des personnes en situation de handicap

Ecosystème d'accompagnement de plus en plus développé, initiatives dans les entreprises de tous secteurs, arrivée des jeunes générations peu enclines à bannir les différences : zoom sur une association, l’Adapt, et plus précisément sur le dispositif ESAT Hors les Murs, qui n’a pas attendu le progressif engouement en faveur de l'entreprise inclusive pour s’engager pour l’emploi des personnes en situation de handicap.

C’est en 1929 que Suzanne Fouché crée l’Adapt, association aujourd’hui reconnue d’utilité publique.  La jeune femme, atteinte de la tuberculose est choquée par le traitement de réclusion réservé aux personnes malades. « Son but, inchangé depuis la création de l'association : que la personne handicapée retrouve sa dignité par une réinsertion dans la société active et professionnelle. » (Adapt)

Depuis, le siècle a fait un bond et la structure a essaimé partout en France : elle compte aujourd’hui 112 établissements répartis dans les 10 nouvelles régions qui agissent tant dans les domaines du médical et de la réadaptation, de la formation, de l’accompagnement social et bien-sûr de l’insertion et de l’inclusion. Cette dernière compétence est confiée aux ESAT, centres d’aide par le travail.

Une passerelle vers le travail en milieu ordinaire

L’Adapt envisage une prise en charge globale des personnes et l’accompagnement à l’emploi en fait évidemment partie. Ainsi, le travail en milieu protégé est une réalité au sein de l’association depuis les années 50.  Depuis, elle « a participé activement à l’élaboration de la loi de février 2005 portant sur l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » (Adapt).

Le dispositif Esat Hors les Murs voit le jour quelques années plus tard. A Floirac, au sein de l’ESAT Gaillan Richelieu, il est créé en 2011. « Le postulat de départ, explique Vina Seedoyal, coordinatrice du service ESAT Hors les murs, c’est que les personnes que nous accompagnons ne veulent pas toujours dire adieu au travail en milieu ordinaire. C’est encore plus vrai dans notre établissement de Floirac qui a la spécificité d’accueillir des personnes cérébrolésées, présentant des lésions à la suite d’un accident de la vie, AVC, Traumatisme crânien, Tumeur cérébrale… Ces personnes ont eu une vie avant, possèdent des compétences, une expérience. Bien-sûr, il reste des séquelles de cet accident. L’emploi doit donc être revu. »

A l’heure actuelle, l’ESAT Hors murs de Floirac peut accueillir 15 personnes en accompagnement. L’encadrement est assuré par une équipe de six professionnels avec une grande variété de profils : une ergothérapeute, une neuropsychologue, des chargées d’insertion, ainsi qu’une conseillère en économie sociale et familiale, une coordinatrice et une cheffe de service, pour le volet social.


Une équipe pluridisciplinaire avec un objectif : garantir la sécurisation des parcours des personnes, accompagner les entreprises accueillantes. 

Tout commence par des évaluations individuelles afin de permettre au postulant de mieux se connaître, de mieux appréhender son handicap, de valoriser ses atouts et compétences ainsi que son potentiel en termes d’amplitude horaire de travail…

« Nous avons différents « outils » : les enquêtes métiers, les visites entreprises, la présence sur des forums, jobdating… pour découvrir ou étendre son réseau. Nous pouvons mettre en place des conventions de stages avec comme finalité 2 objectifs : La mise en place d’un contrat de mise à disposition et si possible conclure par un CDI ! »  
Reste la question de la volonté et de la capacité inclusive des entreprises du territoire.

Faciliter la démarche inclusive des entreprises

C’est là que le dispositif ESAT Hors les Murs prend tout son sens et son importance. Malgré une bonne volonté grandissante de la part des employeurs, il reste souvent un pas que d’aucuns hésitent à franchir. Souvent par méconnaissance. Parfois par appréhension d’un surcroît de travail.

Le handicap reste en effet, le premier motif de saisine du Défenseur des droits en matière de discrimination et les politiques et dispositifs en faveur de l'inclusivité restent l'apanage des grands groupes qui ont les équipes et les process.  L'enjeu est de faciliter la démarche des petites organisations, non soumises à l'obligation légale des 6 %, mais désireuses de devenir inclusives.

L’Esat Hors les Murs s’inscrit dans les actions d’une association d’utilité publique, l’ADAPT, durablement implantée dans tous les territoires. « Notre équipe est réactive et présente, nos professionnels sont habitués à faire les rdvs à l’extérieur et l’entreprise sait qu’elle peut compter sur nous à chaque étape : recrutement, aménagement de poste, explique Vina Seedoyal.  Nous sommes ouverts à toutes formes de partenariat afin d’intégrer une démarche sociétale et citoyenne. Tout le travail fait en amont pour expliquer la démarche permet de mieux intégrer les personnes. L’objectif est aussi de démontrer tous les avantages de cette inclusion.Nous sensibilisons les équipes, les managers, le service RH à la question du handicap invisible et proposons les aménagements de poste si nécessaires. Les missions souvent confiées aux personnes sont travaillées non pas sous forme de fiche de poste mais plus de « tâches à faire ». Ce qui correspond tout à fait aux difficultés que peuvent rencontrer des entreprises qui ont besoin de polyvalence, avec plusieurs taches qui leur prennent du temps et qui les empêchent de se consacrer à leur corps de métier. Nous, on peut les décharger de ces activités chronophages. »

Des bénéfices indéniables pour l’entreprise

Il est vrai que les atouts de l'inclusivité ne sont plus à démontrer, aussi bien en termes d'agilité que de performance. L’entreprise gagne du temps en se déchargeant de certaines tâches et en enrichissant son capital humain. Et la personne accompagnée retrouve le chemin d’une vie sociale et professionnelle plus riche.

A Floirac, on est spécialisé dans nombre d’activités industrielles. Les travailleurs de l’ESAT se consacrent à temps complet ou partiel à du façonnage, du routage, de la petite mécanique, du conditionnement mais aussi de la saisie informatique ou de la distribution. En 2020, ils ont démontré leur efficacité et leur réactivité dès les premières semaines de la pandémie, en conditionnant des milliers de masques pour le secteur public, associatif et privé.

Le bénéfice au niveau de l’intelligence collective et de l’attractivité de la marque employeur est également indéniable.

Au final, adapter un poste de travail, débloquer des moyens n’est pas le plus ardu. D’autant plus que le gouvernement a alloué, en 2021, une enveloppe de 150 millions d’euros au Fonds de développement de l’inclusion, dans le cadre d’un appel à projets pour la relance du secteur de l’insertion par l’activité économique. La prime à l’embauche de 4000€ a également été maintenue et d’autres aides existent pour les TPE et PME.

En revanche, en finir avec les idées reçues selon lesquelles le handicap est synonyme de sous-performance et de sous-productivité nécessite de sensibiliser, communiquer, informer et former régulièrement.  « Pour les entreprises, la mise en place d’un contrat de mise à disposition, n’est pas une procédure de recrutement habituel, insiste Vina Seedoyal. C’est du partenariat ! En termes de sensibilisation, c’est beaucoup mieux que des affiches ! C’est du concret, du partagé… il est question de l’intégration, de l’inclusion. De plus, la formule est intéressante car elle est administrativement flexible et facile à mettre en place, ce qui est aussi un atout. »

Ainsi, depuis 1997, l’ADAPT organise, chaque année en novembre, la Semaine pour l'emploi des personnes handicapées, la SEEPH.

Et l’initiative porte ses fruits. « Les entreprises du territoire sont ouvertes à notre dispositif, constate Vina Seedoyal.  Dans le cadre de la SEEPH, nous avons contacté 46 entreprises de la zone commerciale de Bouliac et 20 ont répondu présent. Pour parler de leur activité, de leurs compétences, répondre à des enquêtes métiers, accepter des stages et pourquoi des mises à disposition par la suite !»

Plus d’infos : https://www.ladapt.net/

Un reportage de Aïcha CHAPELARD

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